NOTICE "FDE" SUR FRANCISCO DE MIRANDA
Schémas cartographiques "Amérique du Sud", "Côte ferme" et "Mer des Caraïbes"

 

I - MIRANDA OFFICIER ESPAGNOL (1756 - 1791)

Francisco de Miranda naît à Caracas le 14 Juin 1756 d'une famille issue de la noblesse du pays basque espagnol. Entré dans l'armée espagnole après avoir fait en France un séjour au cours duquel il fréquente les philosophes et se fait initier à la maçonnerie.
Il fait partie de l'expédition commandée par le meilleur officier de l'armée espagnole, O'Reilly, contre les pirates du dey d'Alger en 1774; puis, en 1779, il se trouve sur le Mississipi, dans les troupes espagnoles de Galvez qui sont aux côté des Français, en soutien des premiers "insurgents" américains contre les Anglais.
Il démissionne de l'armée espagnole en 1783 et fait aux Etats-Unis un séjour d'un an pendant lequel il se découvre une vocation pour émanciper son pays.
A la recherche d'un souverain qui fasse pour l'Amérique du Sud ce que Louis XVI a fait pour l'Amérique du Nord, Miranda, de 1785 à 1791, parcourt l'Angleterre, la Prusse, l'Autriche, la Russie et la Turquie.

 

II - MIRANDA GÉNÉRAL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE (1792 - 1794)

La Révolution attire Miranda en France; il y arrive en Août 1792 et rejoint aussitôt Dumouriez aux armées avec le grade de maréchal de camp. Il échoue devant Maëstrich en Février 1793 et se fait battre à Nerwinden quelques jours plus tard. Traduit devant le tribunal révolutionnaire, il est acquitté.
Il commence à soumettre à la Convention des plans pour le soulèvement des colonies espagnoles. Arrêté comme suspect après la chute des Girondins, il reste en prison du 9 Juillet 1793 jusqu'en Décembre 1794.

 

III - MIRANDA CONSPIRATEUR (1794 - 1804)

Miranda groupe autour de lui les émissaires des libéraux de toute l'Amérique du Sud, et passe bientôt pour "l'homme le plus intrigant d'Europe". Inquiété, car il a des amis dans tous les complots, il passe en Angleterre en 1797.
La couronne britannique vient de s'emparer de l'île de La Trinidad menaçant directement la "côte ferme". Miranda, qui vient de fonder avec des jésuites réfugiés une "Junte des villes et provinces de l'Amérique du Sud", et envisage la constitution d'Etats-Unis de l'Amérique du Sud, présidés par un "Inca", chaque état confédéré étant gouverné par un "Cacique", établit un projet de "Convention". D'après celle-ci, les Anglais, en échange de l'envoi d'un corps expéditionnaire, recevraient des Sud-Américains la possession de plusieurs Antilles et une forte indemnité en argent. Pitt fait traîner les négociations qui échouent.

Miranda se tourne alors vers la France. Il y arrive, le 24 Décembre 1800, au moment de l'attentat de la rue Saint Nicaise contre le Ier consul Napoléon Bonaparte; il est immédiatement expulsé par Fouché qui fait le ménage à gauche puis à droite.
Revenu à Londres, il attend pour y refaire ses offres de service, la rupture de la paix d'Amiens signée en Mars 1802 entre l'Angleterre, la France, la Hollande et l'Espagne, paix qui marque la fin de la 2e coalition contre la France.
Mais l'Espagne déclare la guerre à l'Angleterre, qui dès lors envisage l'annexion des colonies espagnoles, et non plus leur émancipation. Miranda n'en continue pas moins d'assiéger Pitt.

 

IV - TENTATIVES ET ECHECS DE DÉBARQUEMENT AU VÉNÉZUÉLA (1805 - 1806)

Il n'arrive pas à convaincre Pitt. En Juin 1805, il part tenter sa chance aux Etats-Unis encore en guerre avec l'Espagne. Il s'y procure deux petits bâtiments avec lesquels, le 15 Mars 1806, il essaye de débarquer des munitions sur la côte vénézuélienne, à Ocumare. Il échappe pénoblement à une flottille espagnole et se réfugie à La Grenade.
Il en repart quelques mois après avec une petite expédition de 600 hommes, recrutés avec l'aide des Anglais. Le 2 Août, il débarque à Coro et devant l'indifférence totale de la population, doit se rembarquer.

 

V - LE LOYALISME COLONIAL ET L'INSURRECTION AU NOM DU ROI (1807 - 1810)

C'est l'époque où la tentative de conquête de Buenos-Aires (en Argentine alors La Plata) par les Anglais, deux fois dûrement châtiée par le chevalier de Liniers, commandant les troupes espagnoles, soulève le patriotisme espagnol de l'Amérique du Sud et lui fait considérer avec hostilité tout ce qui porte l'estampille anglaise, donc Miranda.
Ces progrès du loyalisme déconcertent les libéraux sud-américains qui n'en reprennent leur tâche qu'avec plus d'énergie surtout quand ils voient l'Espagne incapable d'utiliser cette dernière chance.
Miranda, rentré en Angleterre, se remet bien vite en liaison avec eux; le changement de la politique anglaise, qui se détourne de l'Amérique du Sud pour combattre Napoléon au nom de l'Espagne, aide ces raccomodements.

Le 15 Juillet 1808, un navire français arrive à La Guaira notifier officiellement l'avènement du roi Joseph au trône d'Espagne; il réclame sa reconnaissance par le capitaine général Casas. Sous les protestations générales, l'envoyé français doit rembarquer. Son bateau est rapidement capturé par une escadre anglaise.
Une explosion générale de loyalisme secoue alors toute l'Amérique du Sud. Mais bientôt arrive la nouvelle de la renonciation officielle des Bourbons au trône d'Espagne ainsi que les victoires impériales de Napoléon. Les "libéraux" sur les conseils de Miranda, réclament d'abord partout la constitution de juntes municipales, à l'imitation des défenseurs de l'Espagne contre Napoléon.

L'autorité des vices-rois et des capitaines généraux commence ainsi à être sapé. Bientôt se fait jour dans la population, l'idée que l'héritage de la couronne est en dèshérence. Cette idée est habilement répandue par les sociétés secrètes auxquelles appartiennent les chefs de l'aristocratie locale. L'Espagne est déchue, répète-t-on, et ses colonies "comme des enfants majeurs dont le Père est mort" doivent se gouverner par elles-mêmes. En 1810, l'allégeance envers la personne royale, le jour où les colonies recouvreront leur liberté, n'est pas encore mise en question.

Des révolutions locales vont être orchestrées par la "Loge américaine" dont Miranda a été le fondateur en 1797; il en est resté le Grand Maître. Grâce à aux filiales françaises, anglaises et espagnoles de cette loge, il regroupe tous les Suds-Américains venus achever leurs études en Europe.
C'est ainsi que Bolivar au Vénézuéla, San Martin à La Plata, O'Higgings à Quito en Équateur, Carera au Chili, etc ... suivent les directives de Miranda "Père de l'Indépendance".

Mais les masses populaires , dans leur ensemble, restent rétives et fidèles à l'Espagne. Les "libéraux" doivent donc d'abord se soulever au nom du roi d'Espagne. Quito est la première ville où se constitue le 25 Mai 1809 une "Junte pour le maintien des droits du tant aimé Ferdinand VII". Le soulèvement est durement châtié en Décembre.
A Caracas, le coup mieux monté réussit le 19 Avril 1810: l'autorité du Conseil supérieur de régence est déniée, le capitaine général déclaré déchu, et une "Junte conservatrice des droits de Ferdinand VII" forme un gouvernement. Miranda en a donné le signal, et, à la même époque, fait réussir à Buenos Aires la même opération.
Successivement, la Nouvelle Grenade, le Chili, la Nouvelle Espagne en font autant. A la fin de 1810, seul le Pérou n'a pas bougé.
Bolivar envoyé par la Junte en Juillet 1810 à Londres pour négocier l'alliance avec l'Angleterre, a de longs entretiens avec Miranda et le décide à venir au Vénézuéla.

 

VI - RETOUR DE MIRANDA AU VÉNÉZUÉLA - PROCLAMATION DE L'INDÉPENDANCE (1810 - 1811)

Il débarque au Vénézuéla le 11 Décembre 1810, au moment où Miyarès, capitaine général nouvellement nommé par la régence de Cadix, a déjà remis dans l'obéissance tout l'Ouest du pays.
"Miranda semblait à ce moment la pensée, l'incarnation même de l'émancipation américaine. D'abord obligé de l'Espagne, puis éternellement persécuté par elle, protagoniste des deux grandes révolutions mères, n'était-il pas aussi le commensal invétéré de l'Angleterre victorieuse, le perpétuel ourdisseur de trames, le confident et le collaborateur des jésuites, l'adepte mystérieux des francs-maçonneries?"
Ardemment secondé par Bolivar et bien que profondément désillusionné par l'état du pays, en ne cachant pas son pessimisme, Miranda pousse à la déclaration immédiate de l'indépendance. Il fonde la "Société patriotique" destinée à surveiller et à aiguilloner le Congrès. Ce dernier s'est réuni le 2 Mars 1811 et a juré fidélité à Ferdinand. Dès Juillet, la poire est mûre; l'indépendance est déclarée solennellement le 7 et la république vénézuélienne proclamée.

 

VII - LA GUERRE CIVILE (1811 - 1812)

Le parti espagnol résiste immédiatement. La ville de Valencia se soulève, et une première expédition contre elle ayant échoué, Miranda est nommé général en chef des armées nationales le 19 Juillet 1811. Il s'empare de Valencia le 13 Août 1811, après une campagne très vive, où se manifeste déjà ce caractère de guerre sociale - donc cruelle - qui va être celui de toute guerre civile: la lutte des métis royalistes contre les créoles indépendants.
Revenu siéger au Congrès, Miranda y prêche la centralisation et proteste contre les principes fédéralistes dont s'inspire la constitution à l'étude.

La guerre reprend au début de 1812. Les Espagnols ont pour bases, d'une part la Guyane, de l'autre la côte et la province de Coro. Battus en Guyane en Février 1812, les "indépendants" sévèrement pressès au Nord-Ouest par les troupes de Monteverde, subissent comme toute la population le tremblement de terre du 26 Mars 1812.
Le cataclysme détruit Caracas et anéantit le quart de sa population; il ensevelit les troupes indépendantes, ravage les provinces soulevées, et respecte villes et armées espagnoles. Le peuple y voit un châtiment de Dieu et abandonne en masse la cause de l'indépendance. Le 25 Avril, Monteverde entre à San Carlos; le lendemain, Miranda est nommé dictateur.

Il proclame la loi martiale et essaie de discipliner ses troupes en utilisant un excellent encadrement: gentilhommes vénézuéliens, officiers espagnols passé à l'insurrection, aventuriers anglais, anciens officiers français. Cependant Miranda étale trop sa confiance dans ses officiers étrangers et son mépris pour ses compatriotes. Féru d'ancienne tactique, il ne comprend pas ce qu'il peut tirer de l'ardeur de Bolivar, de sa connaissance du pays et des hommes; il l'envoie commander la forteresse de Puerto Cabello.

Valencia enlevée par Monteverde le 30 Avril, Miranda se porte à sa rencontre avec 5.000 hommes et 14 canons. Battu à Los Guayos, il s'installe dans un camp retranché entre Maracay et La Guaira où Monteverde le presse. Vainqueur du chef espagnol le 20 Juin à La Victoria, il ne sait pas utiliser sa victoire et se renferme dans son camp où il repousse encore les attaques de Monteverde.

 

VIII - FIN DE LA RÉPUBLIQUE VÉNÉZUÉLIENNE (1812 - 1816)

Le 2 Juillet 1812, Bolivar lui apprend que la trahison a livré à l'ennemi le fort de San Felipe qui domine Puerto Cabello. La ville doit être abandonnée le 6 Juillet.
Le Vénézuéla est désormais perdu. Miranda doit capituler le 25 Juillet à San Mateo et se réfugie à La Guaira d'où des bateaux neutres permettent l'émigration des patriotes.
Monteverde viole la capitulation, entre à Caracas, arrête et exécute une partie de la population. Les patriotes réunis à La Guaira voient en Miranda l'auteur du désastre, et quelques conjurés, à la tête desquels est Bolivar, l'arrêtent le 30 Juillet; il est enfermé dans un fort de La Guaira. Monteverde y arrive le lendemain, fait arrêter les révolutionnaires encore présents - Bolivar s'est échappé sous un déguisement - et Miranda en particulier.
Ce dernier, successivement enfermé à Puerto Cabello, puis à Porto Rico, est transporté ensuite à Cadix où il meurt en prison le 14 Juillet 1816.

 

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