Tome III - Chap 32 - Titre I - Annexe Texte 3132 - 15 Septembre 1922 -
Déclaration du Maréchal Franchet d'Espèrey au journal LE MATIN
Mis à jour le 02/11/2024
"En Octobre 1918, lorsque, sur le front serbo-bulgare, les armées alliées que j'avais l'honneur de commander obtinrent la victoire, je me trouvais en présence de deux solutions: marcher sur Constantinople ou marcher sur Vienne et Berlin.
Si la Russie fut demeurée forte et n'eût pas rompu l'alliance, la marche sur Constantinople s'indiquait. Je m'y installais solidement et j'eusse établi une liaison particulièrement rapide avec les armées russes.
Mais comme il n'y avait, pour ainsi dire, plus d'armées russes, la seconde solution s'imposait: suivre la vallée du Danube, ocuper Vienne, marcher sur Berlin. L'opération, en étroit accord avec les armées de Foch dévalant du front occidental, était logique et relativement facile. Elle l'était d'autant plus que j'avais sous mes ordres deux fortes armées d'effectif égal: une armée française, une armée anglaise.
Au moment où je prenais mes dispositions à cet effet et où je me préparais à marcher sur Vienne et Berlin, je reçus de M. Clémenceau un télégramme impératif, brutal, m'enjoignant “de mettre fin à toute initiative personnelle” et de remettre le commandement des unités britanniques à un général anglais qui, après entente avec les gouvernements de Paris et de Londres, allait assumer le haut commandement interallié à Constantinople.
Soldat, je n'avais qu'à m'incliner et à obéir. Mais c'est là un acte sans précédent et dont les conséquences étaient incalculables, car la France livrait ainsi, et pour longtemps, le contrôle absolu de Constantinople et d'une grande partie de la Turquie à l'Angleterre.
L'Histoire jugera cet acte et, en pleine victoire, cet abandon de nos droits."
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