“IL Y A VINGT ANS... AVEC LES POILUS D’ORIENT”

1ère partie


Le SPEAKER - Aux braves de l’Armée d’Orient.
A Tous ceux, Français ou Alliés qui tombèrent sur l’âpre terre de Macédoine... Leur sacrifice permit d’imposer à l’adversaire le premier armistice de la Grande Guerre.
A celui qui fut leur chef, à M. le maréchal Franchet d’Espèrey.

(Gong)

Le SPEAKER - Le 20 Septembre 1938, un soir, après dîner.

(Gong)
(Disque: HOT ou SWING - très moderne)

LUI - Veux-tu que je t'apporte une tasse de café?

ELLE - Oui ! (bruit de journal) Quelles nouvelles ?

LUI - Toujours pareilles... la douche écossaiese...

ELLE - Ah! J’ai reçu une carte des Tellier, ils ont déménagé... ils nous invitent à pendre la crémaillère...

LUI - Où vont-ils habiter ?

ELLE - Rue du Dobropole ! Un drôle de nom!

LUI - (un temps) Tu trouves ? Tu es bien française, toi !

ELLE - Je l’espère bien.

LUI - Oui ! Mais, comme la plupart des Français, tu ignores où se trouve le Dobropole ... et pourtant... tu as entendu parler de la victoire de la Marne ?

ELLE - Tu es stupide, évidemment !

LUI - Eh bien, la victoire du Dobropole, est une victoire que les Armées Alliées d’Orient ont remportée le 15 Septembre 1918 et dont l’importance a été capitale. depuis la Marne, c’était la première fois qu’on exploitait la rupture du front ennemi.

ELLE - Alors, le Dobropole, c’est un village ? une ville ?


La pyramide du Dobropole


Frontière Grèce - Serbie

LUI - Non ! une montagne, qui se trouve à la frontière de l’ancienne Serbie. Nous ne sortons pas ce soir? ... non ?... Arrête le phono! - (fin du disque)
Je vais te parler de cette victoire... tu reconnaîtras que je ne t’accable pas de mes souvenirs de guerre, mais aujourd’hui, on fête le 20 e anniversaire de cette vctoire... des camarades sont là-bas... un pélerinage organisé par la Fédération nationale des Poilus d’Orient.



Monument du sculpteur Seltz dit “Le Gaucher”

Ils inaugurent un monument, l’oeuvre du sculpteur Seltz, dit “Le Gaucher”, car mutilé d’un bras. Eux, se souviennent ! ... Accompagnons-les par la pensée, je vais prendre dans mon bureau quelques papiers... Assieds-toi là... Prends cette carte, tu pourras suivre... Ecoute, je vais te lire quelques notes d’un capitaine de la 122e division d’infanterie “La Glorieuse”, notes rédigées le jour même de la bataille...


(Disque: SYMPHONIE HÉROIQUE ... Fond sonore tout le temps)


PC 122e DI


Gal Topart

“15 Septembre 1918 - 10 h:
Je suis au PC du général Topart commandant la 122e DI qui est installée dans un abri à un observatoire d’où l’on découvre toute l’âpre ligne des défenses ennemies.


Tour d’horizon: Dobropole, Kotka, Kravitza

J’ai devant moi, à gauche le Sokol, le Dobropole, le Kotka. Ces monts sont les objectifs des divisions de gauche... en face la forêt de Kravitza, les monts Oblatouchka... le redan du Hérisson, clef de la position.
A droite, l’Oreille d’éléphant, le Vetrenik... au loin le Koziak. C’est la seconde ligne ennemie, c’est là où il faut qu’arrivent les divisions de droite... Tout est sillonné de tranchées. Un rude morceau...!
Des officiers penchés sur des horaires, ou parlant au téléphone d’une voix au ton impératif, ou la jumelle aux yeux, dictent des ordres ou annoncent des résultats, visages tendus, traits tirés, ordres brefs... Tous, inconsciemment participent à l’action par leurs réflexes.

12 h - le combat continue dans la clairière de Kravitza, pour la possession de la crète. C’est la cinquième contre-attaque... les mitrailleurs ennemis se sont faits tués plutôt que de se rendre...

7 h du soir - Le Vetrenik est pris, le Koziak tient toujours, la position est terriblement dure... sur cette croupe, à 1700 m il y a paraît-il près de 5000 hommes, un bataillon saxon, le 209e d’infanterie allemande, un bataillon bulgare.

ELLE - Et ces feuilles jaunies ?...

LUI - C’est le carnet de route de Louis Cordier...

ELLE - Louis Cordier, qui est-ce ?


Général Pruneau

LUI - Un poilu, un sergent observateur, à la 17e division d’infanterie coloniale du général Pruneau. Ces notes sont aussi écrites durant l’action. Elles sont encore plus vivantes...Elles te donneront envie de lire son très beau livre “Ceux du 1er Armistice”.

“A 5h30, la préparation d’artillerie s’arrête brusquement. Elle s’était déclenchée hier matin à 8h... On n’a jamais rien entendu de tel, à l’Armée d’Orient... Cette fois, c’est nous qui sommes les plus forts!... Ce doit être le signal... oui... c’est l’attaque... Des hommes courrent... d’énormes éclatements noirs! ... trop tard ! Ils ont passé ... C’est le 45e qui vient de sortir...

Dans le vacarme et la stupeur, au petit jour, sur la façade sombre d’Oblatouchka dressé contre l’aurore, l’arc brillant des fusées vient de s’élever...

De la gauche, tout près, une clameur !... Entre les troncs desséchés de la forêt de chataigniers de Retka Chourma, dont le haut seul commence à s’éclairer, c’est le 54e régiment d’infanterie qui s’avance... les virgules de feu des grenades... Ah! çà, j’ai la berlue, non, le 30e régiment d’infanterie sort de l’ombre projetée par la montagne sur la forêt de Kravitza, seuls les casques émergent, abordant la falaise par la droite... Ils se déploient ...


Groupe de mitrailleurs Hotchkiss

Voici les gars de la compagnie de mitrailleuses, avec sur les épaules leurs Hotchkiss et de leurs trépieds; on ne voit rien, on ne sait rien... Des crépitements dans la forêt devant le 30e RI, un marmitage confus... de long martellements de mitrailleuses, du côté de la 122e division d’infanterie et du 1er régiment colonial.


Le lieutenant téléphone

10 h - Le lieutenant téléphone que le régiment progresse lentement à travers le taillis où l’ennemi a des abris nombreux...


Canon de 37mm

12 h - La division serbe de la Choumadia aurait dépassé l’Oreille d’Eléphant par l’Est... On entend l’aboiement de nos canons de 37mm qui tirent dans les créneaux du Hérisson...

15h20 - Une patrouille du 2e bataillon sort à gauche du Hérisson... rafales de mitrailleuses ... la patrouille s’est aplatie....

15h25 - Fusée blanche !... le Hérisson ne tire plus.

16h - Des soldats en kaki - des nôtres se détachent sur la crète du Hérisson.


Français et Serbes interrogent des Allemands

16h40 - Le Hérisson est pris... la jonction est faite à droite avec les Serbes.

17h45 - Plus rien à faire, là où nous sommes. C’est étrange de pouvoir se promener librement, banalement, là où il y a une heure, on était une cible... Le paysage vient de désarmer...
Sortant des rochers, des arbres sur le versant occidental de Vetrenik, un régiment serbe monte par petits paquets qui gagnent la crète et s’y rassemblent ... C’est la gauche de la division de Choumadia... On distingue les officiers à cheval... La 17e DIC a atteint tous ses objectifs.

( Fin de la SYMPHONIE HÉROIQUE)

21h - La victoire est totale ... la bataille a été très sévère. En 15 heures de combat, nous sommes maîtres de la ligne de forteresses, constituée par le Sokol - Dobropole - Kravitza - Vetrenik.


Les Serbes montent

La brêche est ouverte ... Les Serbes montent - C’est la 2e Armée avec les divisions du Timok et la division yougoslave....
Ils sont sans capotes, nerveux, frémissants d’enthousiasme... ils foulent le sol de leur patrie...


Poste de secours

Le lieutenant qui marche devant la section de tête, à la hauteur du poste de secours, devant les morts, s’arrête, enlève son casque et s’incline ...
Un cri de ses hommes lui répond : France! France!...
Les soldats serbes présentent les armes aux morts et aux blessés, embrassent ceux qui leur ont ouvert les portes de la patrie...
Les Français entonnent la Marseillaise.

(Disque: ALLONS ENFANTS DE LA PATRIE, LE JOUR DE GLOIRE EST ARRIVÉ - fin)

La colonne s’allonge, les lignes de tirailleurs se déploient, s’enfoncent et disparaissent dans la forêt et dans la nuit... vers le Nord...


Montée vers les points importants

Le 16 Septembre, au matin, les divisions serbes ont pris les cotes 1810 et 1825, les points importants de la 2e ligne sur le Koziak.
La victoire est à nous...

(Grand temps d’arrêt)

ELLE - Quel était le général qui commandait?

LUI - Le général Franchet d’Espèrey maintenant maréchal de France.

(Gong)